Accueil > L’exclusivité contractuelle et les comportements opportunistes
2002
Prix de thèse de l’Université de Paris II, Panthéon-Assas.
Ouvrage honoré d’une subvention de l’IDEA, Institut de Droit Économique et des Affaires de l’Université d’Orléans
Préface
Michel Pédamon.
Sylvie Lebreton
Le droit de la distribution se crée peu à peu en mêlant les différentes sources de droit : quelques règles légales éparses que les rédacteurs du nouveau code de commerce ont tenté de réunir et qui ont été modifiées par la loi du 15 mai 2001, relative aux nouvelles régulations économiques, une imposante jurisprudence relative aux obus dans la détermination du prix ou lors de la rupture du lien contractuel d’exclusivité, ou encore relative aux violations des réseaux de distribution, sans oublier les réflexions doctrinales et les créations toujours renouvelées de la pratique commerciale.
Le regard porté dans cet ouvrage sur les clauses d’exclusivité, essentielles dans la plupart des contrats de distribution, se trouve enrichi des apports de la science économique et particulièrement des travaux des spécialistes de l’économie industrielle, selon lesquels les contrats de distribution comportant une telle clause, ou à tout le moins une substance d’exclusivité, peuvent être considérés comme d’efficaces alternatives au marché.
Ces mêmes auteurs soulignent cependant que de telles relations contractuelles, le plus souvent de longue durée, ont tendance à favoriser des comportements opportunistes, consistant à rechercher un intérêt personnel dans un esprit de tromperie. De tels comportements déloyaux constituent une menace pour les échanges en faussant le processus concurrentiel. Ces comportements opportunistes peuvent d’une part, être le fait des contractants ; ils se réalisent alors au sein de la relation contractuelle d’exclusivité. L’auteur les qualifie d’abus d’exclusivité, abus dans l’exercice d’un droit contractuel portant une atteinte illicite au processus concurrentiel.
D’autre part ces comportements opportunistes peuvent être le fait de tiers au contrat qui cherchent à violer l’exclusivité ; ils se réalisent alors à l’extérieur de la relation contractuelle d’exclusivité. L’auteur les qualifie de violation d’exclusivité, abus dans l’exercice du droit de concurrence portant une atteinte illicite à la situation contractuelle d’exclusivité. Ces deux comportements apparaissent donc de même nature économique en appelant cependant des règles juridiques de prévention et de sanction différentes.
Ce constat dressé par l’auteur vient en balance de l’essor des pouvoirs de l’AMF – droit de communication de tous documents, d’accès aux locaux professionnels, de procéder à des infiltrations numériques, de perquisition menée par les enquêteurs, etc. – qui ne pouvait qu’appeler des contreforts. […] Le second temps de l’étude se déprend des preuves matérielles pour se porter sur le raisonnement à partir des preuves ainsi réunies qu’est conduit à tenir la Commission des sanctions de l’AMF. Ce parti pris est en lui-même un apport de la thèse. Le raisonnement probatoire est en effet la boîte noire du droit de la preuve, lequel demeure trop souvent concentré sur les preuves matérielles et leur mode d’administration et d’admissibilité. […] Finalement, […] les ambitions de la thèse de Monsieur Nicolas Ida conjuguent harmonieusement suggestions spécifiques d’amélioration de la procédure devant l’AMF et propositions plus globales d’évolution du droit de la preuve en général. Le droit financier se révèle ainsi comme un point d’observation privilégié du droit de la preuve tant il exacerbe les difficultés habituelles que rencontre ce dernier, et oblige donc davantage qu’ailleurs encore, à les transcender.